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Arkel/Ange et Diablesses : une résurrection inattendue et inespérée


Faut-il aimer un personnage et un univers au point de réussir, contre toute attente, à leur redonner vie plus de 25 ans
après les avoir créés ? Tel est le constat qui s’impose en découvrant les deux sorties simultanées chez Dupuis de deux tomes de la série Ange et Diablesses, titrées respectivement Au plus haut des cieux et La nuit du grand bouc.
Et de quoi s’agit-il précisément ?

Au début des années 80 apparut Arkel, ange gardien blondinet, affrontant comme de juste les hordes démoniaques de l’Envers armé d’ue sorte de sabre laser croisé avec une tronçonneuse (si, si). Arkel est né sous la plume déjà nerveuse de Marc Hardy, qui est également le dessinateur des séries Lolo et Sucette (avec Yann) et surtout Pierre Tombal (avec Raoul Cauvin),

pour les plus connues. Au scénario, c’est le très prolifique Stephen Desberg, qui aujourd’hui cartonne avec la série financière IR$, Empire USA ou encore le Scorpion avec Enrico Marini. Hardy et Desberg sont des auteurs “maison” de Dupuis, même si depuis l’un et l’autre se sont largement affranchis.
Situation éditoriale très peu courante, Arkel revient donc 25 ans après ses dernières aventures dessinées, et plus de 15 ans après une première réédition chez l’éditeur Palombia, qui a disparu depuis, qui avait relancé les trois premiers tomes des aventures du petit angelot. A part dans des intégrales, qui sentent souvent le sapin il faut le reconnaître, ou lors de reprises de séries par d’autres auteurs, comme Lucky Luke, Boule et Bill ou encore Blake & Mortimer (objectivement bien plus connus qu’Arkel), la reprise d’une “petite” série et par ses auteurs et par son éditeur historique est un évènement extrêmement rare. Concrètement, Dupuis, en accord avec les auteurs, a “ressuscité” le dernier album d’Arkel, initialement baptisé Estelle, et lui a ajouté une suite, dessinée par Marc Hardy tout récemment afin de clore le cycle, sous le titre un peu pompeux Anges & Diablesses. Ce sont donc deux albums qui sortent, un qui date de 1983 (avec des modifications et des mises à jour), l’autre de 2009, qui se complète et montre, si besoin, l’évolution de Marc Hardy dans son emploi magistral du pinceau.

Alors faut-il lire Ange & Diablesses ? Personnellement, je suis un lecteur d’Arkel période Palombia, pour la raison simple que j’étais, adolescent, fasciné par les séries mettant en scène des anges gardien, ce qui curieusement, malgré notre héritage judéo-chrétien, n’est pas si courant que cela en BD (sauf en manga, mais les titres sont apparus bien plus tard, je n’étais déjà plus la cible). J’ai donc accueilli les nouveaux albums avec plaisir et nostalgie. Et bien que 25 ans les sépare, la continuité narrative est bien respectée, le dessin cohérent et cela reste facile à lire. J’ajoute que la colorisation a été homogénéisée, ce qui est également un point positif qui favorise l’immersion. Arkel/Ange & Diablesses s’apprécie aussi au travers de l’incroyable passion que doivent ressentir ses auteurs pour avoir réussi à relancer le titre après plusieurs décennies, auteurs qui n’ont pas “besoin” de cette série pour bien vivre de leur talent. C’est une belle leçon pour tous ceux et toutes celles qui ont un projet dans le coeur (moi autant que les autres) et qui veulent le faire vivre au mépris du temps qui passe.

Arkel/Ange & Diablesses est à découvrir pour son parfum singulier, de souffre infernal bien sûr, pour la place singulière qu’il a dans l’univers de ses auteurs et pour son sujet, l’affrontement entre anges et démons, qui est traité de manière frontale, sans que le monde des hommes n’en soit affecté. J’émettrai enfin deux regrets à propos de cette relance : Dupuis n’a aux dernières nouvelles pas prévu de republier les trois premiers titres, et des éléments d’explication sur l’histoire de la série insérées dans les albums, avec témoignages des auteurs et dessins inédits, auraient permis de marquer davantage le coup sur l’évènement. En guise de consolation, je vous renvoie tout de même vers
la page d’illustrations méconnues d’Hardy, tirée de son site personnel, où on voit qu’Arkel demeure plus que jamais une série qui compte pour lui.
(illustrations : couvertures des deux volumes d’Ange & Diablesses, par Hardy et Desberg, éditions Dupuis)


Merci à "Le comptoir de la BD" pour cet article, pour consulter leur site cliquez sur le lien.